CLAUDE MONTAL,

Accordeur et facteur de pianos de génie

Claude Montal est né en 1800 à Lapalisse. Il devient aveugle à l’âge de 6 ans suite à une fièvre typhoïde dont il est sauvé in extremis. Sa cécité est complète.

À cette époque, l’INJA (Institut National des Jeunes Aveugles), qui propose une scolarité adaptée aux personnes souffrant de handicap visuel, existe depuis quelques décennies. Malheureusement, la création de cet établissement était alors méconnue en province. Claude suivra une scolarité classique dans sa ville de campagne et apprendra la musique.

Au moment où ses parents entendent parler de l’institution parisienne, Claude est officiellement trop âgé pour intégrer l’école.  Cependant, avec le soutien d’une duchesse et une légère entourloupe sur son âge (14 ans au lieu de 16), il arrive à obtenir une place.

En plus des apprentissages scolaires de base, Claude poursuit ses cours de musique, il répète alors ses exercices de pianos sur les instruments de l’école mais les trouve très désaccordés. Il entreprend, avec la complicité d’un répétiteur mais sans autorisation ou formation, de les accorder seul. Le travail apparemment était correct, voire impressionnant, mais les pianos furent fermés à clef pour éviter toute récidive.

Tourrasse, le répétiteur complice, arrive à obtenir un vieux piano et les deux amis s’entrainent durant leur temps libre à l’accorder. Ils progressent de manière impressionnante. Montal invente notamment une nouvelle méthode pour réaliser ses partitions d’accord.

La réfection de l’orgue de l’école étant trop onéreuse, le directeur consent à confier à Tourrasse et Montal cette mission et à investir dans un équipement de menuiserie-ébénisterie. Montal étudie tous les ouvrages traitant de la restauration des orgues à sa disposition et voyage pour se former auprès de ses pairs. Le résultat est finalement excellent.

Une fois sa scolarité achevée, et après avoir entretenu une bonne partie du parc instrumental de son école, Claude décide en 1830 de quitter l’établissement et de tente de faire carrière. Son talent était incontesté entre les 4 murs de l’INJA, mais son nom étant inconnu à l’extérieur, il vécut 2 ans d’extrême précarité, confronté aux préjugés liés à son ‘infirmité’.

Dans le livre consacré à l’œuvre du célèbre facteur, Claude Montal, Sa vie et ses travaux, Michel Möring décrit bien l’injustice à laquelle font face les personnes atteintes de déficience visuelle : «  On suppose, à tort, que leurs études sont imparfaites ; dès lors, on se croit dispensé de juger leurs œuvres, et on les condamne sans examen. La vie d’un grand nombre d’aveugle se consume à lutter contre ces erreurs d’opinion. »

Heureusement, en 1832, la vie de Claude prend un tournant lorsqu’un professeur du conservatoire admiratif de son travail le recommande comme « le premier accordeur de Paris ». Sa clientèle s’élargie, Claude donne des conférences et publie son fameux traité « l’Art d’accorder soi-même son Piano ». Son ouvrage est initialement imprimé en toute hâte sous un format abrégé pour devancer un de ses élèves qui projetait de publier le contenu entendu en conférence sous sa signature. La version complète est éditée peu de temps après et devient un succès planétaire grâce à sa commercialisation à l’exposition universelle de 1834.

Ayant désormais les moyens financiers d’avoir son atelier, Claude se lance dans la restauration et la facture de pianos. En 1836, il ouvre en parallèle de son activité d’artisan la classe d’Accord-Facture à l’INJA, qui existe encore aujourd’hui.

L’inventivité de Claude Montal est prodigieuse, il s’intéresse à la mécanique, la structure harmonique, au meuble et aux travaux d’ébénisterie. Les meubles de ses pianos sont souvent sculptés, ornementés en relief, ce qui permet aussi aux personnes aveugles d’en apprécier la beauté et la symétrie.

Dès les années 1840, il dépose des brevets dont certains seront récompensés par des médailles :

–              Système de transposition

–              Pédale d’expression

–              Système de contre tirage

–              Perfectionnement des chevalets et de la table d’harmonie

Son handicap lui vaut toujours des remarques grinçantes et beaucoup d’artistes de l’époque ne jurent que par Erard et Pleyel. Cependant, Claude Montal fournira les compositeurs Gabriel Fauré et César Franck et sera remarqué par l’Empereur Napoléon III, qui le désignera comme le fournisseur officiel de la cour et le décorera de la légion d’honneur.

Bibliographie

Claude Montal, sa vie et ses travaux, P.A. DUFAU, E. BIENAIME, A. TAHAN, 1857

L’Art d’accorder soi-même son piano, C. MONTAL

http://www.inja.fr/Default/accordeur-de-piano.aspx